Notre manque de rédactrices et de rédacteurs nous a contraints ce 1er octobre à manquer notre rendez-vous mensuel. Nous vous présentons toutes nos excuses pour ces 5 jours de retard. En effet, comme nous le rappelons chaque mois dans le post scriptum, l’équipe de la revue de presse a grand besoin de renfort ! Si vous voulez participer, n’hésitez pas à nous contacter. Éplucher le web à la recherche de divers faits mathématiques, vulgariser les derniers résultats pour la rubrique Recherche, tenir le compte des annonces et contre-annonces des responsables politiques pour la rubrique Enseignement, relever les évènements mathématiques auxquels ont participé des classes ou le grand public pour la rubrique Diffusion, etc. Il y a du boulot et il y en a pour tous les goûts !
À la une
L’équipe de la revue de presse adresse ses chaleureuses félicitations à l’association MATh en JEANS qui a reçu une médaille de la médiation scientifique du CNRS. L’association, dont le nom est un acronyme correspondant à Méthode d’Apprentissage des Théories mathématiques en Jumelant des Etablissements pour une Approche Nouvelle du Savoir, avait déjà reçu le Prix d’Alembert de la SMF en 1992. C’est que cette méthode, qui permet aux élèves de découvrir la recherche mathématique au cours d’une année scolaire, marche très bien. D’après Aviva Szprirglas, présidente de l’association, citée par le site du CNRS, « Sur l’année scolaire 2022-2023, environ 3725 élèves sont passés par 288 ateliers de l’association, dont 46 % à 50 % de filles selon les années ». À la fin de l’année, les participants se retrouvent en congrès, et cela dure depuis 34 ans ! Pour illustrer notre revue de presse ce mois-ci, nous avons choisi la belle affiche qui annonçait les 4 congrès Math en Jeans de 2011. C’était la première fois que, vu son succès grandissant, le congrès national annuel se déclinait en plusieurs congrès en région. Douze ans après, ce ne sont pas moins de 13 sites différents, en France et à l’étranger, qui ont accueilli au printemps dernier un congrès Math en Jeans ! Voici la vidéo de celui qui s’est déroulé à Valenciennes. Honneur aux deux inventeurs de ce dispositif extraordinaire, hélas trop tôt disparus : Pierre Audin et Pierre Duchet.
Recherche
Rebondissant sur un article (Three-body periodic collisionless equal-mass free-fall orbits revisited) soumis sur ArXiv fin aout, Techno-Science publie en ligne un article, L’insoluble problème à trois corps : des mathématiciens découvrent 12000 nouvelles solutions (repris deux jours plus tard sur le site de Science et Vie) sur cette question qui taraude les mathématiciens depuis Newton. En 2000, le problème à trois corps a trouvé un renouveau par la solution périodique en huit, trouvée par Alain Chenciner et Richard Mongomery. La publication en 2001 par Richard Montgomery de son article A New Solution to the Three-Body Problem dans les Notices de l’AMS avait été très remarquée. Rappelons que les articles soumis sur ArXiv sont des pré-publications, et qu’en attendant une publication, il n’y a a priori pas eu de travail de relecture par des pairs.
La tuile du « problème einstein » dont nous parlions dans les « Parutions » d’avril et dans la rubrique « Recherche » des mois de juin et de mars continue à surfer sur son succès dans la presse généraliste. C’est au tour de Courrier Internationalde publier (fin aout) pour ses abonnés un article, Dave Smith, l’homme qui rêvait de fabriquer des formes nouvelles, inspiré par l’article du Times, sur cette « histoire presque ridicule, mais merveilleuse » (comme le dit Craig Kaplan). L’aventure d’un typographe retraité qui résout un vieux problème mathématique plait, une problématique simple à énoncer, un résultat visuel : tous les ingrédients sont là pour séduire, intéresser voire passionner un large public.
Est-ce qu’il existe un lien entre les mathématiques et la nature ? Randolph Grace, professeur de psychologie à l’université de Canterbury, (Nouvelle Zélande) suggère en s’appuyant sur des études menées récemment avec son équipe que les mathématiques, en particulier l’arithmétique, pourraient être enracinées dans la biologie. En août il a publié dans The Conversation un article, Arithmetic has a biological origin – « it’s an expression in symbols of the ‘deep structure’ of our perception », qui a été repris par Daily Geek Show. Les mathématiques seraient à la fois inventées (uniquement humaines) et découvertes (biologiquement fondées). Cela expliquerait-il « la déraisonnable efficacité des mathématiques dans les sciences naturelles » (voir ici ou là) dont parlait le physicien Eugène Wigner ? La question risque d’être encore longtemps débattue …
Vie de la Recherche
Mathématiques et carrières, notamment féminines
Près d’un an après la tenue des Assises des mathématiques, dont nous avons parlé dans les revues de presse des mois de janvier, juillet-août, et novembre 2022 ainsi que des mois de janvier et février 2023, et la publication de la synthèse des travaux préparatoires des groupes de travail, le CNRS publie les Actes des Assises ainsi que 15 actions pour une stratégie nationale en direction des mathématiques, 2023. Si certaines de ces 15 recommandations sont très concrètes (par exemple les 4 premières), d’autres sont plutôt vagues (comme la cinquième), ou apparaissent comme des vœux pieux qui n’engagent strictement à rien (la quinzième et dernière est à cet égard éloquente !). Mais ce qui laisse pantois·e dans ces quinze actions, c’est qu’aucune d’elles ne contient la moindre allusion au problème des inégalités entre hommes et femmes, qui se pose sérieusement en science et qui est absolument tragique en mathématiques. Or ce sujet a été très largement abordé lors des assises, aussi bien dans les exposés que dans les discussions. C’est ce que note l’association femmes & mathématiques, à qui la « pauvreté » de ces quinze actions n’a évidemment pas échappé. Pour femmes & mathématiques, l’omission d’un sujet aussi important s’ajoute aux effets désastreux de la réforme Blanquer-Mathiot, qui a provoqué une aggravation brutale des inégalités de genre dans la spécialité mathématique, et cela « va peser très lourdement dans la disparition progressive des femmes en mathématiques à laquelle nous assistons ».
Le podcast « Le temps du débat » de France Culture s’interrogeait fin août sur la possibilité de faire carrière dans la recherche scientifique. L’émission invitait à ce titre Christine Musselin directrice scientifique à Sciences Po, chercheuse au CNRS, Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, et Boris Gralak Secrétaire général du Syndicat national des chercheurs scientifiques/SNCS-FSU. Malgré les vaines tentatives de l’animateur de remettre la question de la vision de la recherche et du choix politique au sein du débat, en ponctuant ses interventions de citations extraites du livre d’Adèle Combes « Comment l’Université broie les jeunes chercheurs » ou encore du documentaire Arte « Profs de Fac, la vocation à l’épreuve », le débat reste convenu, sur des vérités générales qu’aucun·e intervenant·e ne songerait à questionner, sans doute aussi parce que les générations d’enseignant·e·s-chercheur·se·s réuni·e·s autour de la table ne sont pas celles concernées par les difficultés actuelles. Ainsi quand Antoine Petit explique que seulement quinze pour cent des docteur·e·s obtiennent un emploi d’(enseignant·e·s-)chercheur·e·s, chacun·e autour de la table opine du chef en se demandant quelle serait la bonne proportion, sans jamais poser la question de la fuite des cerveaux dans l’industrie ou de l’immense gabegie pour le service public d’investir dans la formation de la main-d’œuvre surqualifiée du privé.
« Le temps du débat de France Culture » s’interrogeait en septembre dernier « Parcours scientifiques : où seront les femmes ? » L’échange eut lieu entre Mélanie Guenais, mathématicienne, enseignante-chercheuse à l’université Paris Saclay et vice-présidente de la Société de mathématiques de France ; Béatrice Marticorena, directrice de recherche CNRS affectée au LISA (Laboratoire Interuniversitaire des Systèmes Atmosphérique), co-présidente du Comité Parité Egalité du CNRS ; et Marie-Liesse Bizard, ingénieure aéronautique, vice-présidente de la Société des ingénieurs et scientifiques de France (IESF), et fut nourri par la tribune parue dans Le Monde. L’émission est l’occasion de revenir sur les réformes successives de l’enseignement des mathématiques au cours des dernières années, les stéréotypes de genre, et les pistes possibles, à différents niveaux d’éducation, pour lutter contre. Parmi ces différents leviers, il y a le recours aux rôles modèles, souvent évoqué en première instance, mais dont la mise en pratique est à nuancer : « car même s’il y a une augmentation du nombre de femmes globalement dans la recherche, tout dépend des disciplines. [explique Mélanie Guenais] Pour les mathématiques fondamentales, il n’y a que 7% de femmes professeures et 14% de femmes maitresses de conférences en France. La question que nous devons nous poser est donc la suivante : comment donner des modèles lorsqu’il n’y a pas d’enseignantes femmes dans nos licences ? » Il ne manquerait plus qu’à ajouter comment augmenter le nombre d’enseignantes femmes dans nos licences en pleine crise du recrutement ? Et la boucle serait bouclée… Stéréotypes de genre toujours, dans la revue de presse de février dernier nous revenions sur un épisode du magazine pour enfants J’aime Lire et sur ses « maladresses ». L’association Femmes et mathématiques a décidé de traiter plus largement la question de femmes et des mathématiques lors d’une Table Ronde qui se tiendra à l’Institut Henri Poincaré samedi 7 octobre prochain de 14h à 17h (participation gratuite sur inscription). L’association résume ainsi « “6 ans, c’est l’âge où les garçons deviennent meilleurs que les filles en maths…” Voilà ce qu’on trouve en 2023 dans un magazine pour la jeunesse bien connu. Ainsi présenté, il apparaît comme une fatalité inéluctable. Le stéréotype est déjà en place : les filles sont moins bonnes que les garçons en maths. Il a déclenché chez plusieurs d’entre nous la volonté d’en savoir plus sur le traitement des filles et des maths dans la littérature jeunesse et plus largement dans les publications jeunesse. »
Les mathématiques au service du développement durable…
Le nouveau site web de l’Institut des Mathématiques pour la Planète Terre (IMPT) est désormais disponible. Ce groupement d’intérêt scientifique initié par l’institut national des sciences mathématiques et leurs interactions du CNRS et la fédération de recherche en mathématiques Auvergne-Rhône-Alpes entend assurer quatre missions : « fédérer les communautés de recherche » et l’interdisciplinarité autour de problématiques communes ayant trait à l’écologie, « financer des projets pluri-disciplinaires », « accélérer le transfert de connaissances » et « diffuser la science auprès du grand public », tout ceci autour de trois grands axes « terre vivante », « terre fluide et solide » et « terre humaine ». Les lecteurs et lectrices intéressé·e·s gagneront sans doute à ignorer la communication de la page d’accueil qui a de quoi refroidir par la vacuité des informations qu’elle contient, pour se concentrer sur les pages ressources riches en informations et ressources adressées à des publics divers et pensées pour une navigation ergonomique.
Mathématiques et développement encore, l’Académie française des sciences communique sur la première rencontre franco-vietnamienne sur les mathématiques pour le développement, qui s’est tenue du 21 au 23 septembre à Hanoï. L’évènement est organisé par l’institution en collaboration avec le Vietnam Institute for Advanced Study in Mathematics, la Hanoï University of Science, et la Vietnam National University. En plus des lectures plénières, des sessions thématiques étaient organisées en parallèle autour des thématiques suivantes : théorie du contrôle appliquée aux problèmes sociétaux ; développement durable : gestion de l’eau, hydrologie et gestion de la pêche ; intelligence artificielle et science de la donnée.
Et enjeu d’une existence et d’une reconnaissance à l’international
Dans un article en anglais, le New York Times revient sur l’ouverture du Centre International de Mathématiques en Ukraine et la conférence inaugurale qui s’est tenue en parallèle entre Kiev et Varsovie « Nombres dans l’univers : avancées récentes en théorie des nombres et leurs applications ». La récente médaillée Fields Maryna Viazovska faisait partie des conférencières, elle explique : « le but est d’emmener le monde des mathématiques en Ukraine et d’ouvrir, ou ré-ouvrir, la science ukrainienne au monde » 1« The goal is to bring the world of mathematics to Ukraine and open, or reopen, Ukrainian science for the world ». La mathématicienne Masha Vlasenko, également conférencière, indique que c’est cette récente propulsion des mathématiques ukrainienne sur la scène internationale avec la consécration de sa collègue, couplée à la guerre, qui ont précipité la création de cet institut dont elle rêvait depuis longtemps. « Il ya une profonde tradition des sciences et des mathématiques dans ce pays, mais au cours des dernières décennies, notamment à cause du manque de financement, il y a eu une fuite massive des cerveaux : les étudiant·e·s et chercheur·euse·s avaient le sentiment de devoir partir pour avancer. » 2« There is a deep tradition of science and math in the country, but in the last several decades, in part due to underfunding, there has been a massive brain drain as students and researchers feel they must go elsewhere to advance. ». L’institut est indépendant et son existence est dépendante de financements privés ou publics internationaux. Il compte en particulier parmi ses donateurs le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
Applications
Faire sauter les verrous de l’histoire
Si la cryptographie est connue pour faire les choux gras du commerce en ligne et des banques qui commercialisent les paiements dématérialisés, un article d’Ouest France, aux allures de conversation avec Emmanuel Thomé, directeur de recherche, Aurore Guillevic et Cécile Pierrot, chargées de recherches, toustes trois à Nancy, laisse le soin aux chercheur·euse·s de vulgariser leur discipline et d’en proposer des applications moins connues, parmi lesquelles le déchiffrage de documents historiques. Ainsi en 2022, Cécile Pierrot, Pierrick Gaudry et Paul Zimmermann, également en poste en mathématiques à Nancy, et Camille Desenclos, historienne à l’université de Picardie, ont décrypté une correspondance entre Charles Quint, empereur du saint-empire romain germanique et François premier. Cette découverte n’est pas un fait isolé, le quotidien explique « En février, une équipe de trois cryptologues du projet international DECRYPT a déchiffré des lettres de Mary Stuart, reine d’Écosse, décapitée en 1587. 3L’histoire a été relayée dans la presse anglophone, par exemple dans cet article de Cosmosmagazine. »
Physique et phénomènes climatiques extrêmes
Le site de l’ENS Paris-Sciences-Lettres fait ce mois-ci le portrait de Freddy Bouchet, physicien spécialiste de l’étude des extrêmes du climat, directeur de recherches et nouvellement professeur attaché à l’ENS-PSL. L’occasion de parler un peu du climat, de l’apport de la physique (notamment statistique), des mathématiques et de l’intelligence artificielle à la compréhension des changements climatiques, du réchauffement et de la prédiction des phénomènes extrêmes ; et de faire (beaucoup, compte-tenue de la relative importance de cette question par rapport à la précédente) la promotion de l’ENS-PSL (un tiers des questions tout de même).
Penser l’intelligence artificielle
Le média marocain TelQuel consacre un court article à l’organisation à Londres, en novembre prochain, d’un sommet international sur les questions de sécurité posées par le développement de l’intelligence artificielle. Le communiqué de presse du gouvernement britannique explique qu’il s’agira d’examiner « les risques de l’IA » et de « discuter de la manière dont ils peuvent être atténués par une action coordonnées à l’échelle internationale ». Ce sommet devrait permettre d’établir « une série de mesures rapides et ciblées visant à renforcer la sécurité de l’utilisation de l’IA ». Sur ces questions de sécurité, Le Point🔒 accorde ce mois-ci un entretien à Daniel Andler, mathématicien spécialiste de la théorie des modèles et membre de l’Académie des sciences morales et politiques, qui appelle à « une réflexion mesurée concernant la place de l’IA dans nos sociétés ». Cette question serait par ailleurs au cœur de la formation prodiguée par l’École Normale supérieure Paris-Saclay. Le Point🔒 revient sur le master « mathématiques, vision, apprentissage » (MVA) dont l’acronyme est aussi peu explicite que l’article que le journal lui consacre, plus soucieux de lister des chiffres non sourcés entre mots clés et formules de communication (« l’ENA de l’IA ») que de détailler véritablement le contenu de la formation ou interroger ses objectifs. Dans la veine des articles dont le titre ne reflète pas le contenu Le Revenu accorde ce mois-ci un entretien à Cédric Villani et titre « Cédric Villani : « L’IA est un remarquable chapitre de la révolution de l’information » ». La question de l’intelligence artificielle n’est en fait abordée qu’au détour d’une seule question, dans le reste de l’entretien, le mathématicien et homme politique réussit la prouesse de dépolitiser les questions politiques (notamment sur le plan écologique), offre une publicité à certaines entreprises qu’il estime vertueuses (sans trop rentrer dans les détails de leur vertu), aborde la suite de sa carrière scientifique et politique, et répond à des questions aux thématiques aussi générales et vagues que ses réponses.
L’intelligence artificielle au service de la communication entre espèces
L’anecdote pourrait prêter à sourire mais elle augure de potentielles avancées notoires dans de nombreux domaines, notamment (mais pas seulement) pour le bien-être animal : le site web de la RTBF consacre un article à une étude récente(en anglais, et encore au stade de pré-publication, l’article n’a pas encore été soumis à relecture et validation) qui met l’intelligence artificielle au service de la compréhension des poulets. Les auteurs, Adrian Cheok, Jun Cai et Ying Yan (qui n’ont, pour ces derniers, pas d’affiliation explicite) ont décidé de recourir à un sous-domaine de l’intelligence artificielle, l’apprentissage profond ou deep learning qui utilise des réseaux de neurones artificiels dans la résolution de problèmes complexes (tels que la compréhension des émotions, dans ce cas, la sous-discipline concernée est recensée sous le nom de « Deep Emotional Analysis Learning ». L’idée était ici de mettre ces techniques au service de la compréhension des émotions des volatiles à partir des sons qu’ils émettent. L’étude a été menée en collaboration avec des psychologues animaliers et des vétérinaires.
L’intelligence artificielle permettra t-elle de repenser l’enseignement ?
Le site Développez.com publiait le 28 Août dernier un article qui reprenait les conclusions d’une étude menée par des chercheurs et chercheuses de l’université d’Abou Dhabi : si ses performances dans certaines matières surpassent celles de la moyenne des étudiants et étudiantes, ChatGPT peinerait encore à exceller dans certains domaines, notamment les mathématiques. L’article en ligne explique qu’« il n’est peut-être pas surprenant de constater que les seules questions pour lesquelles ChatGPT obtient de meilleurs résultats que les étudiant·e·s sont celles qui requièrent des connaissances factuelles, ce qui atteste des quantités massives de données sur lesquelles il a été entraîné. » Le journaliste recense également quelques cas notables de réussites plus ou moins marquées (suivant les domaines) de ChatGPT à des diplômes universitaires et s’intéresse aux conséquence de l’arrivée de ce nouvel outil sur l’enseignement des matières dans lesquelles il performe. Si la question du plagiat et de la triche est sur toutes les lèvres, d’aucun·e·s y voient également une formidable opportunité de repenser l’évaluation des apprentissages, mais également, par exemple pour les praticien·ne·s du droit, un outil au service de l’efficacité de leur pratique. Un article de The Conversation un peu plus récent complète ce tableau : une récente mise à jour de ChatGPT permet l’accès à l’extension Code interpreter et rend l’outil « très puissant dans le domaine du calcul, du raisonnement et de la résolution de problèmes. » Les auteurs de l’article ont donc décidé de tester les aptitudes de cette nouvelle version en la soumettant à des « problèmes relativement complexes de 5e secondaire en physique, en chimie et en mathématiques. » Et les résultats semblent sans appel : le robot reformule la question, explique et détaille le raisonnement et obtient la réponse correcte. L’article conclut avec des pistes de réflexions intéressantes sur les potentielles utilisations de l’intelligence artificielle comme aide aux devoirs, notamment (et les auteurs insistent sur ce point 4En rappelant que « les conditions d’utilisation de ChatGPT-4 impliquent l’encadrement d’un parent lien en anglais)) en servant de béquille à des parents potentiellement dépassé·e·s par les apprentissages qui se complexifient avec l’arrivée dans le secondaire.
Enseignement
Le Conseil scientifique de l’Éducation nationale (CSEN), présidé par le neuroscientifique Stanislas Dehaene, publie une « note d’alerte » dans laquelle il pointe une « inquiétante mécompréhension » (admirons ce mot…) des nombres et surtout des fractions de la part des élèves entrant en sixième. Le CSEN n’avait pas semblé jusqu’ici se soucier particulièrement de l’enseignement des mathématiques : les intitulés des 11 groupes de travail dont il s’est doté sont à cet égard édifiants, comme l’est le vade-mecum qui les invite à « organiser la réflexion sur un sujet clé ». Les mathématiques ne font probablement pas partie des sujets clés. Il faut dire que ce conseil, mis en place par le ministre Blanquer, est composé de 29 membres dont les spécialités se répartissent comme suit : climatologie (1), informatique (1), philosophie (1), stratégie et théorie des organisations (1), mathématiques (2), sciences de l’éducation (2), sociologie (2), sciences cognitives (3), neurosciences (4), économie (6), psychologie (6). Saluons néanmoins cette soudaine prise de conscience des petits problèmes que rencontre l’enseignement des mathématiques ! Cette note d’alerte a attiré l’attention de nombreux médias. Citons entre autres Le Figaro, Le Parisien et France Info.
Visiblement agacée (et on la comprend !) par cette alerte du CSEN et l’écho qu’elle a eu dans les médias, Claire Lommé a eu la bonne idée de donner, dans Le Café pédagogique, des pistes concrètes pour essayer d’améliorer la situation, en s’appuyant sur son expérience récente auprès d’élèves de 11 ans à 15 ans « en situation de handicaps cognitifs variés ». Elle conseille de privilégier la verbalisation et la manipulation, mais veut se garder « de toute généralité ». Son article s’intitule « Parler pour faire des maths ».
Le manque de professeurs et l’extrême difficulté à assurer des remplacements n’ont jamais été aussi criants. The Conversation parle d’« un casse-tête pour l’Éducation nationale ». On apprend dans Ouest-France que le principal d’un collège de Gironde où il manque quatre professeurs (dont un de mathématiques) s’est résolu à lancer un appel aux parents d’élèves pour essayer d’en recruter !
Le Café pédagogique commente dans un éditorial les annonces de Gabriel Attal pour sa première rentrée comme ministre de l’Éducation nationale (report en juin des épreuves de spécialité et interdiction de l’abaya).
Le Collectif Maths&Sciences « et ses partenaires du monde de l’entreprise » ont publié dans le journal Le Monde une tribune : Filles, maths, sciences : impasses impairs et manques consultable sur le site du collectif. Les signataires y « rappellent les impacts durables et dramatiques provoqués par la trop faible place des mathématiques et des sciences dans l’organisation du lycée général actuel ».
The Conversation se demande si les inégalités de genre ne seraient pas favorisées par les évaluations de primaire. L’article s’appuie sur le fait, constaté depuis quelques années, que « les résultats des filles en mathématiques à la mi-CP (janvier) s’écartent négativement de ceux des garçons alors même que, quelques mois auparavant, ceux de l’évaluation d’entrée au CP (septembre) ne révélaient aucun écart. Ces écarts se poursuivent, de manière encore plus marquée, au début du CE1. »
Le problème des inégalités faisait partie des thèmes abordés par Mélanie Guenais, vice-présidente de la Société mathématique de France, invitée fin août deTélématin sur France 2. Elle a souligné la catastrophe qu’a été la dernière réforme du lycée, à coup sûr pour les mathématiques mais sans doute aussi pour les autres disciplines et a essayé d’expliquer pourquoi la France était à la traîne en mathématiques.
L’Humanité se fait l’écho de vives réactions dans les universités suite aux propos qu’Emmanuel Macron avait tenu sur la chaîne YouTube hugodécrypte. Le président de la République avait alors mis en cause des formations qui seraient trop peu professionnalisantes et accusé les universités d’être mauvaises gestionnaires de leurs deniers et responsables d’un « gâchis collectif ». Le Monde 🔒 rapporte la réplique « agacée » de Guillaume Gellé, président de France Universités, qui veut « rétablir quelques vérités » et estime que les établissements « ne peuvent plus prendre en charge les dépenses que l’Etat n’assume pas ». Le quotidien y voit « un nouvel épisode d’une crise de confiance qui dure ».
L’OCDE a publié un rapport sur les systèmes éducatifs dans 49 pays membres ou partenaires, qui a été évoqué et analysé dans de nombreux médias. L’Express relève que la France est « championne du temps consacré aux savoirs fondamentaux dans l’OCDE ». France Info s’est intéressé aux données du rapport sur les dépenses par élève, la répartition du temps scolaire et la rémunération des profs. Le site vousnousils y a lu que « les efforts de la France [sont] toujours insuffisants ». Pour le média réunionnais LINFO.RE, qui cite France Info, « la France présente un bilan mitigé en comparaison avec 48 pays membres ou partenaires de l’organisation ». Les Échos ont retenu qu’en France, « les écoliers ont beaucoup plus d’heures qu’ailleurs pour apprendre à lire et compter […], sans pour autant avoir de meilleurs résultats ». C’est aussi ce qu’a voulu souligner Le Point.
À l’honneur
Le CNRS vient d’attribuer cinq médailles de la médiation scientifique pour 2023. Saluons tout particulièrement celle qui revient à l’association MATh.en.JEANS. Il y a près de 34 ans que cette expérience unique a vu le jour : proposer à des élèves de devenir des apprentis-chercheurs en mathématiques.
Un atelier MATh.en.JEANS, ce sont deux établissements scolaires, deux classes, des élèves volontaires, leurs profs de maths, une chercheuse ou un chercheur, un problème pas facile, un travail étalé sur plusieurs mois et enfin un rassemblement en fin d’année où l’on exposera ses travaux, exactement comme dans les congrès de mathématiques professionnels.
« Ne subissez pas les maths, vivez-les ! » : le slogan choisi par Pierre Audin et Pierre Duchet, créateurs de MATh.en.JEANS, illustre à merveille leur idée, qui s’est immédiatement avérée féconde. L’expansion spectaculaire et le succès éclatant que connaissent aujourd’hui les ateliers MATh.en.JEANS sont incontestables. L’honneur qui leur est rendu par le CNRS est amplement mérité. On regrettera cependant qu’il soit bien tardif. « Les deux Pierre » (Audin et Duchet) ne sont hélas plus là pour le savourer. En leur mémoire, découvrons avec émotion l’historique impressionnant des actions Math en Jeans depuis 34 ans. Un projet pilote avait associé en 1989-90 le lycée Jean Jaurès d’Argenteuil (professeur : René Veillet) et le lycée Racine de Paris (professeur : Pierre Audin). Un des groupes d’élèves avait planché sur l’infini. Quant au chercheur, c’était Pierre Duchet.
Militant anarchiste, opposant au régime de Vladimir Poutine, le mathématicien russe Azat Miftakhov est persécuté dans son pays par le pouvoir, qui s’acharne contre lui. Arrêté en février 2019, il était soupçonné de « fabrication d’explosifs », mais cette accusation a été abandonnée et remplacée par celle de participation à des actes de vandalisme (attaque d’un local du parti Russie Unie de Vladimir Poutine). Condamné à six ans d’emprisonnement dans une colonie pénitentiaire pour « hooliganisme », il a été libéré ce 4 septembre, mais aussitôt remis en prison, accusé cette fois d’avoir tenu pendant sa détention des propos « justifiant le terrorisme ». Une mobilisation de grande ampleur a lieu un peu partout dans le monde pour défendre Azat Miftakhov, notamment (mais pas seulement) au sein de la communauté mathématique. Un Comité Azat Miftakhov s’est constitué. Son site internet donne beaucoup d’informations sur cette affaire. Il y a aussi un historique très complet sur le site militant L’Anticapitaliste. Signalons aussi un article du Monde 🔒 publié au lendemain de la nouvelle arrestation du jeune opposant. La Société mathématique de France est fortement mobilisée pour dénoncer le sort fait à Miftakhov, auquel elle consacre un dossier spécial. Elle a soutenu une campagne de photos. Il s’agissait pour les universitaires d’envoyer massivement des photos destinées à rappeler aux autorités russes que Miftakhov devait être libéré le 4 septembre. Il l’a bien été, mais seulement pour quelques minutes…
Le combat pour la liberté et contre les injustices, les tortures et les crimes commis par des États contre des opposants est une solide et vieille tradition de la communauté mathématique. Elle remonte au moins au cas de Maurice Audin, mathématicien arrêté, torturé et exécuté par l’armée française en juin 1957 alors qu’il luttait pour l’indépendance de l’Algérie. L’émission Affaires sensibles sur France Inter vient de rappeler opportunément cet épisode consternant en abordant la question de la torture en Algérie. L’occasion de rappeler que l’Association Josette et Maurice Audin continue à se battre pour que toute la lumière soit faite sur les circonstances de l’exécution d’Audin et sur les milliers d’autres disparitions analogues.
Le quatre-centième anniversaire de la naissance de Blaise Pascal est célébré tout au long de cette année 2023 (voir les rubriques Histoire et À l’honneur de notre revue de presse du mois de juin). Le président de la Fondation Blaise Pascal, Cédric Villani, était invité pour en parler dans l’émission 28 minutes sur Arte.
René Thom, lui, aurait eu 100 ans le 2 septembre. Ce grand mathématicien a été plusieurs fois honoré ce mois-ci pour marquer cet anniversaire. L’Académie des sciences lui a d’abord rendu hommage le 19 lors d’une séance solennelle destinée à un large public : L’héritage de René Thom, géomètre par excellence. Dans les trois jours qui suivaient, un colloque se tenait à l’Institut des Hautes Études Scientifiques. Devant un public averti, pas moins de 16 spécialistes de haut niveau ont traité de thèmes très variés qui avaient en commun d’être liés aux idées et aux travaux de Thom. Signalons aussi un article d’Étienne Ghys, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, sur le site France Mémoire : Naissance du mathématicien René Thom. Enfin, c’est l’occasion de rappeler que la Société mathématique de France a publié les Œuvres mathématiques de René Thom (3 volumes).
Il y a décidément de nombreux anniversaires de mathématiciens ! Le centenaire du logicien Georg Kreisel, américain d’origine autrichienne, né le 15 septembre 1923 et disparu en 2015, ne semble pas avoir retenu l’attention des médias, en France ou à l’étranger. C’est pourtant grâce à Kreisel que la logique est (re)devenue une branche essentielle des mathématiques dans notre pays dans les années 1960 et que des enseignements de logique se sont développés dans nos universités. Georg Kreisel avait été invité (par Daniel Lacombe) à donner une série de cours à l’Institut Henri Poincaré. Son séjour à Paris a donné lieu à la rédaction par Jean-Louis Krivine de la plupart des chapitres des Éléments de logique mathématique, ouvrage connu comme Le Kreisel-Krivine.
L’École polytechnique propose de redécouvrir un de ses anciens élèves : Henri Poincaré, mathématicien et physicien, « modèle du savant universel ». À l’occasion du cent-cinquantième anniversaire de son admission, le musée de l’école lui consacre une belle exposition.
Pour les mathématiques, le point d’orgue de cette rentrée est l’inauguration du premier musée qui leur est entièrement consacré. La Maison Poincaré a ouvert ses portes au public ce samedi 30 septembre, après une inauguration solennellequelques jours plus tôt par la ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau.
C’est l’aboutissement d’un projet voulu il y a une dizaine d’années par Cédric Villani, alors directeur de l’Institut Henri Poincaré (IHP), qui abrite le musée dans l’ancien laboratoire du grand physicien Jean Perrin, juste en face, sur le campus Pierre et Marie Curie. Et c’est sous la houlette de Sylvie Benzoni-Gavage, actuelle directrice de l’IHP, que l’idée de Villani s’est concrétisée. Les médias ont largement couvert cet événement. Pour Ouest-France, il s’agit de « montrer les maths en action », et « ce nouveau musée promet une expérience « inattendue » » France Info parle d’un « musée des maths « féministe » […] présentant autant de mathématiciennes que de mathématiciens ». L’émission La science CQFD du 27 septembre sur France Culture était consacrée à ce musée des maths. De son côté, le 13-14 de France Inter accueillait Sylvie Benzoni-Gavage. La directrice de l’IHP, évidemment très sollicitée, a aussi donné une chronique à Sciences et avenir. La maison Poincaré a même fait l’objet d’articles dans des journaux où il n’est pas souvent question de mathématiques, comme Elle, Cosmopolitan ou Paris secret, et jusqu’au Liban ! Naturellement, les tutelles de la Maison Poincaré se félicitent de son lancement, qu’il s’agisse de Sorbonne Université (dont l’IHP est une composante), du CNRSet de son journal, ou du ministère de l’Enseignement supérieur.
Mais tout en se réjouissant de cette belle impulsion donnée aux mathématiques, certain.es s’interrogent sur le financement de la Maison Poincaré, assuré par un PPP (partenariat public-privé). Dans un appel à manifester lors de l’inauguration officielle du musée, l’intersyndicale Sorbonne Université (CGT, SUD, FO-ESR, Solidaires Etudiant-es, FSU) dénonce les conditions dans lesquelles fonctionnera cette structure, qui devra se contenter de ses ressources propres : « Ce projet de musée repose depuis le départ sur le travail d’une succession de CDD et de stagiaires […]. Seulement 1 poste de titulaire est envisagé pour pérenniser son fonctionnement et celui du bâtiment de 3 étages qui l’abrite. Le tout devra s’auto – financer notamment en louant ses espaces (amphithéâtre, salle de réception, …) à des sociétés événementielles, ce qui porte atteinte à l’indépendance universitaire. » Selon les syndicats, une soixantaine d’étudiant.es et personnels ont effectivement manifesté, perturbant le déroulé de la cérémonie. La présence de Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale, et celle d’Emmanuel Macron étaient initialement prévues, mais tous les deux y ont renoncé.
Diffusion
La diffusion de la science devient de plus en plus une affaire de promotion, de communication et même parfois de marketing. La fête de la science, qui a lieu cette année du 6 au 16 octobre en métropole et du 10 au 27 novembre outre-mer et à l’étranger, n’échappe pas à cette évolution. Ses marraines et ses parrains qui se succèdent depuis 2016, « sans être scientifiques eux-mêmes », « contribuent à sa notoriété », grâce notamment à « leur engagement médiatique qui attire l’attention des publics sur l’événement ». La marraine 2023 est médecin généraliste, animatrice, « influenceuse sport et bien-être » et… ancienne Miss France.
Comme d’habitude, d’innombrables manifestations très variées sont proposées. À Nice, où la fête proprement dite a lieu les 14 et 15 octobre, le service de culture scientifique du laboratoire Mathématiques et Interactions J.-A. Dieudonné vous invite du 8 au 10 novembre à un Fabrikathon. au sein de son Mamath. L’événement est financé par Audimath et par le GDR Platon.
En prélude à la fête de la science, la ville du Havre proposait la deuxième édition de Sur les épaules des géants : trois journées qui visent à « (re)donner le goût des sciences ». Le site nous accueille avec « une invitation à explorer les savoirs scientifiques, […] à mieux comprendre la démarche et l’histoire des sciences, […], à découvrir les parcours de chercheurs du passé et d’aujourd’hui, […] à prendre le temps de la curiosité, de l’expérimentation, de la découverte et de la démonstration ». On apprend aussi dans ce texte (visiblement rédigé par des communicants aguerris…) que « notre présent est le résultat d’une histoire », que « la formule évoque l’ADN même du Havre » et que « cette manifestation ouverte à tous, pensée pour démocratiser les sciences et diffuser les savoirs, se déroulera au cœur d’un quartier universitaire et populaire, autour d’une programmation accessible et expérientielle », grâce à des « intervenantsvisionnaires venant de toute la France ». Ouest-France et Paris-Normandie (qui est revenu sur le sujet) ont présenté cet événement, mais dans des articles réservés à leurs abonnés, ce qui est une curieuse façon de promouvoir la culture scientifique.
Ayham Alata, qui vit à Angers (Maine-et-Loire) et est un ancien enseignant en droit reconverti en auto-entrepreneur, a récemment créé un jeu de cartes simple et instructif, principalement basé sur le calcul : Nambarz (libre adaptation phonétique du mot anglais numbers !). Ouest-France avait présenté le jeu et s’était entretenu avec son créateur pendant l’été.
Parutions
En librairie :
Début septembre l’INSMI est revenu sur la sortie du livre d’Amandine Aftalion (voir la revue de presse du mois dernier), Pourquoi est-on penché dans les virages ?, un livre qui croise mathématiques, physique et sport et répond à de nombreuses questions « que posent les enfants »… et les plus grands ! Le sujet pique la curiosité. Le livre intrigue les lecteurs. La presse en parle ! Sur les ondes elle est invitée pour aborder la question Jusqu’où le sport peut-il être éclairé par les sciences ? dans l’émission Autour de la question de RFI par Caroline Lachowsky qui la présente comme mathématicienne spécialiste de la modélisation et de l’optimisation de la course à pied, formidable passeuse de science sur sa chaine VideoDiMath). L’émission, passionnante, est à la fois une introduction à la lecture du livre et un complément pour éclairer certains points abordés dans l’ouvrage. Amandine Aftalion qui a réalisé plusieurs vidéos (voir ici ou là) parle (à la fin de l’émission) de la chaine vidéo et du concours proposé aux enseignants et à leurs élèves. Fin septembre elle est l’invitée de l’équipe d’Étienne Klein sur France Culture pour expliquer comment les mathématiques et la physique permettent de comprendre et d’appréhender le sport de manière nouvelle. Dans la presse écrite, Les Échos parlent d’une vulgarisation bienvenue en ces temps sportifs. De quoi susciter des vocations de scientifiques ? De quoi donner envie de faire du sport ? Et pourquoi pas !. Dans Le Monde Jean-Baptiste Jacquin lui consacre une critique. À un an des Jeux olympiques de Paris 2024, un livre vient bousculer bien des certitudes de l’amateur de sport explique-t-il au sujet de cet ouvrage. Parions que beaucoup de lecteurs vont lire ce livre pour avoir des réponses à certaines questions qu’ils se posent ,mais en le refermant ils ne porteront plus le même regard sur leur sport favori. Ce que l’autrice apporte, au-delà des aspects de la « physique » (dont certains sont abordés par ailleurs et autrement), c’est le regard de la mathématicienne, la façon dont elle aborde les problèmes et bien sûr un éclairage sur des recherches actuelles cruciales dans de nombreux domaines sportifs.
Pour cette rentrée littéraire, la sortie (voir les parutions du mois dernier) du dernier roman de Mathias Énard, Déserter, est répercutée par de nombreuses critiques, certaines élogieuses, d’autres plus réservées. Ce roman entrelace deux récits, deux styles, deux mondes, et traite un même sujet : la désertion. Il met en scène la vie de deux personnages imaginaires, celle d’un soldat déserteur d’une guerre non identifiée qui se cache dans un maquis méditerranéen et semble fuir sa propre violence d’une part et celle d’un brillant mathématicien est-allemand, Paul Heudeber, auquel est consacré un colloque et que nous raconte sa fille Irina. Mathias Enard, qui a remporté en 2015 le prix Goncourt avec Boussoles, écrit de façon magnifique. Et cette fois encore, le lire est un réel plaisir s’enthousiasme Le journal de Montréal. L’ouvrage avait été présenté en avant première sur France Culture par Mathias Énard qui est, rappelons-le, le producteur de l’émission L’entretien littéraire. Ce que ne manque pas de souligner le journal en ligne ActuaLitté qui estime que le lecteur reste, au bout du compte, quelque peu sur sa faim. Dans l’Humanité, Sophie Joubert écrit : Dans « Déserter », l’auteur de Zone et de Boussole revient à ses obsessions : la guerre, la réflexion sur l’histoire, le rapport entre l’Europe et l’Orient. Les Échos parlent d’un roman virtuose et intelligent sur la violence de l’histoire et notre incapacité à y échapper. La Croix affirme dans un article sous-titré « Déserter », de Mathias Enard : guerre et poésie mathématique : L’œuvre de Mathias Enard, créateur puissant et sans doute le plus doué de sa génération, consiste à explorer, avec une grâce tout en densité, à quel point déferlent les horreurs.
En kiosque :
Né à Pavie le 24 septembre 1501 et mort à Rome le 21 septembre 1576, le premier à introduire les nombres imaginaires.
Le monde est-il imaginaire ? s’interroge Pour la Science. Le numéro de septembre (arrivé tardivement) mettait à la une les « nombres imaginaires » dont la « découverte » remonte au seizième siècle. L’article signé par trois physiciens, Marc-Olivier Renou, Antonio Acin et Miguel Navascués reprend celui publié en avril dans le Scientific American (dont, rappelons-le, « Pour la Science » est la version française). Les nombres imaginaires sont une astuce mathématique étonnamment efficace pour mener des calculs. Mais ils seraient bien plus que cela. Sans eux, la théorie quantique standard est incapable de décrire certaines expériences !
Le second volet est une interview (par François Lassagne, le rédacteur en chef de Pour la Science) de Frédéric Patras, mathématicien et philosophe. Il est en particulier rédacteur en chef des Annals of Mathematics and Philosophy (voir la rubrique des parutions du 1er juin). Cet article titré La théorie quantique renouvelle la question du rapport entre réel physique et modélisation mathématique nous explique que les nombres imaginaires sont apparus dès la première moitié du XVIe siècle. La physique y a rapidement vu de précieux outils mathématiques fondamentaux et la mécanique quantique leur attribue un rôle essentiel. Le texte, très abordable, mêle l’histoire des nombres complexes et les rapports de la physique aux nombres.
Le jeu de la vie est un jeu de simulation (au sens mathématique) très connu. Il a été imaginé en 1970 par un magicien des maths, le regretté John Horton Conway. Malgré des règles très simples, il est Turing-complet. On en connaissait des configurations périodiques pour toutes les périodes possibles sauf deux correspondant à des périodes égales à 19 et 41. Les cycles manquants, de longueur 19 et 41, viennent d’être découverts en juillet 2023 comme l’explique Sean Bailly dans son article Le jeu de la vie est omnipériodique. Pour la Science a eu la très bonne idée d’offrir l’article à ses lecteurs. Il est publié en ligne (mais le téléchargement de la version « pdf » est réservé aux abonnés numériques).
En octobre Pour la Science livrera une nouvelle promenade mathématique, Des mondes parallèles en mathématiques ?. Vous la trouverez dans la rubrique mensuelle de Jean-Paul Delahaye. L’article qui aborde une controverse entre logiciens émergeant depuis une quinzaine d’années, le débat sur le « multivers ensembliste » emmènera le lecteur aux frontières des mathématiques et de la philosophie mathématique.
Couvrant septembre et octobre le 273e numéro du magazine Tangente met en exergue l’art de dénombrer et ses multiples facettes. Savez-vous par exemple comment on dénombre une population d’écureuils ? le nombre d’étoiles ? Vous y retrouverez aussi les nombres de Sophie Germain ou les nombres de Carmichael et bien d’autres pépites encore ! Un article est consacré à Adrien-Marie Legendre et la recherche de solutions entières ou rationnelles à des équations algébriques, un autre à Egon Balas, un pionnier de l’optimisation en nombres entiers. Enfin la quatrième de couverture dévoile la date de la journée Tangente 2023 : le dimanche 3 décembre. Le Tangente hors série de septembre est lui consacré à des activités clé en mathématiques : Majorer, minorer, comparer et tous les aspects liés aux inégalités. Comme c’est la règle, il sera certainement suivi par un petit livre de la bibliothèque Tangente.
Pas encore en librairie :
La fin de l’année s’approche doucement … Les presses universitaires de Grenoble viennent de dévoiler le Calendrier Mathématique 2024 ! Des images superbes, des textes passionnants pour chaque mois, des problèmes nouveaux et originaux… Vous pouvez d’ores et déjà compléter votre collection dès le mois d’octobre. Il propose deux parcours collège (6e-5e et 4e-3e), et le défi du mois pour les insatiables. Nous aurons l’occasion d’en reparler, mais les passionnés ne résisteront pas à l’envie de le pré-commander (il est au même prix que l’an dernier).
Histoire
Les rubriques Vie de la recherche et Enseignement de cette revue de presse interrogent régulièrement la représentation des femmes dans divers aspects des mathématiques (de la recherche à l’enseignement) et l’importance des modèles féminins. Dans un récent article (en espagnol) El correo réhabilite auprès du grand public ces mathématiciennes espagnoles oubliées ou ignorées (car contraintes à dissimuler leur genre pour pouvoir exercer leur métier). De l’existence et les contributions plus ou moins certaines de Fátima de Madrid au Xe siècle à María del Carmen Martínez Sancho, première femme espagnole doctoresse en mathématiques en 1928, ces portraits de femmes se conjuguent pour laisser apparaître au grand jour une histoire bien plus riche et dense que ce que la culture populaire a bien voulu retenir.
Arts et mathématiques
Le Café pédagogique revient ce mois-ci sur le dernier film de Thomas Lilti, « Un métier sérieux », qu’il résume ainsi : « Nouvelle année scolaire au collège. Pierre, Meriem, Fouad, Sophie, Sandrine, Alix et Sofiane, un groupe d’enseignant·e·s engagé·e·s et soudé·e·s se retrouve. Benjamin, jeune professeur de mathématiques remplaçant les rejoints. Sans expérience, [il est] rapidement confronté aux affres du métier. Au contact de ses collègues, le novice avec ses élèves connaît l’épreuve de la « première fois » et va découvrir combien la passion de l’enseignement demeure vivante au sein d’une institution pourtant fragilisée. » Le réalisateur d’« Hippocrate » (film en 2014, série en 2018 pour la première saison), de « Médecin de campagne » et de « Première année » s’attaque ici à un autre pan des services publics où la vocation est mise à rude épreuve à différents niveaux, qu’ils soient personnels ou institutionnels (voire politiques). L’article, publié dans le cadre d’un partenariat, conclu : « « Un métier sérieux » ne traite pas son sujet, -l’enseignement et ceux qui le font vivre-, à la légère. Le réalisateur veut souligner le rôle majeur d’un « service public » en crise, les nobles missions d’une institution qui se soucie peu de ses serviteurs et les amène à mettre à l’épreuve leur vocation, à chercher du sens à leur métier dans le souci de l’autre, de l’apprentissage du savoir et du lien social malgré le dépérissement de leur légitimité, le manque de considération pour leur responsabilité émancipatrice. »
L’association Têtes en l’art « met en avant une approche ludique et décomplexée de l’Histoire de l’Art et des pratiques artistiques ». Elle « propose des ateliers dans lesquels les enfants partent à la découverte des artistes, des courants artistiques, de l’Histoire, des domaines artistiques variés ». À Concarneau (Finistère), en partenariat avec la municipalité, l’association anime cette année des activités pour un peu plus de 1000 élèves du primaire, autour du projet d’arts vivants « Un goût de mer ». Ouest-France 🔒 écrit que, grâce à ce dispositif, « les mathématiques et les arts vont être simples à comprendre ». Dans un autre article (en libre accès), des élus et responsables concarnois en charge de la culture commentent le projet et en décrivent les effets positifs attendus.
La compagnie Terraquée, dont nous avons parlé ici le mois dernier, organise la septième édition du festival Maths en villeà Saint-Denis (93). Conférences, ateliers, spectacles, animations, expositions, le programme est alléchant !
Pour finir
Après leur coup d’éclat de cet été, avec la publicité truquée des plus belles actions des bleues sur lesquelles ils avaient calqué les joueurs de l’équipe masculine pour convaincre le spectateur lambda qui trouve que ’le foot des femmes, c’est moins technique, c’est moins physique’ (voir cet article sur Eurosport), Orange est retombé dans le piège du sexisme ordinaire avec un spot qui a été retiré des ondes depuis comme l’a repéré le site e-marketing :
« Audrey déteste les maths. Donc quand Flore lui dit que 8 au carré ça fait 64, elle-ne-comprend-pas. Mais quand elle lui explique que le forfait mobile 2 heures, 100 mégas, est à zéro euro. Et bah là, c’est évident ! Voilà. »
Alors qu’on est en octobre et que le pinkwashing bat son plein, il n’y a pas que l’Insmi et France Universités qui sont à la traine avec leur manque d’ambition pour pallier le manque de femmes en maths…
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Par exemple, on pourra écrire que sont les deux solutions complexes de l’équation .
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