Le Haut Conseil des Biotechnologies (HCB) vient d’être mis en place. Une de ses missions sera d’évaluer les risques et bénéfices socio-économiques des organismes génétiquement modifiés (OGM). Je fais partie du comité scientifique du HCB en tant que statisticien. J’avais déjà fait partie début 2008 du Comité de Préfiguration à la Haute Autorité (CPHA) sur les OGM. Pour rappel, les autorités françaises ont invoqué en février 2008 la clause de sauvegarde pour la culture du maïs MON810, un maïs transgénique produit et commercialisé par la firme MONSANTO. L’activation de cette clause de sauvegarde faisait suite à l’avis rendu par le CPHA qui faisait état d’une série d’interrogations en ce qui concerne l’évaluation des risques sanitaires et environnementaux liées à la culture et la consommation de ce maïs.
Il faut signaler qu’il n’ y avait pas de statisticien dans les précédentes instances chargées d’évaluer les OGM (commission du génie génétique, commission du génie biomoléculaire). Le fait que la statistique soit maintenant représentée (au même titre que la génétique, la biologie moléculaire, la toxicologie, l’écologie,…) est incontestablement une bonne chose car la statistique joue un rôle fondamental dans l’évaluation des risques et les procédures statistiques utilisées doivent être irréprochables.
J’ai été amené à regarder de près ces procédures statistiques, aussi bien celles utilisées par MONSANTO (pour démontrer que les OGM ne présentent aucun risque…), que celles utilisées dans différentes études scientifiques (pour démontrer au contraire que les OGM présentent des risques…). De nombreuses faiblesses et erreurs méthodologiques sont présentes dans ces études et rendent difficile l’utilisation des résultats obtenus pour une évaluation pertinente des risques.
J’ai rédigé une tribune expliquant essentiellement que nous sommes dans un environnement incertain, et donc qu’il est bien difficile d’affirmer quoi que ce soit avec certitude. Après quelques tentatives infructueuses auprès de certains grands quotidiens, Les Echos ont accepté de publier cette tribune le 29 avril 1 Pour les OGM, il faut d’abord évaluer clairement les incertitudes ; voir article des Echos., avant qu’un article sur le sujet ne paraisse dans Le Monde du 13 mai dernier 2Selon un mathématicien, la fiabilité statistique des études portant sur les effets sanitaires des OGM est insignifiante ; voir article du Monde..
J’avoue avoir été surpris des réactions à cet article du Monde : cet article a été repris depuis sur de nombreux blogs, sur France Inter, sur LCI, par un mensuel scientifique… je ne pensais vraiment pas la statistique aussi médiatique ! Au delà du débat sur les OGM, qu’en conclure maintenant pour les mathématiques ?
Tout d’abord le mathématicien semble jouir d’une certaine « aura » dans ces débats de société (le fait que le journaliste du Monde ait titré « Selon un mathématicien,… » le montre bien !). On attend de nous d’être rigoureux et d’être au dessus de la mêlée… C’est notre rôle et notre devoir d’être bien présents dans ces débats.
Présenter cette facette des mathématiques est sans doute une bonne chose pour « l’image des mathématiques » auprès du grand public, et peut éventuellement contribuer à lutter contre cette fameuse désaffection des étudiants pour les filières scientifiques qui nous préoccupe tous.
Enfin, cela confirme bien que le besoin de former de bons statisticiens dans de nombreux domaines est aujourd’hui plus que réel. Les pratiques statistiques couramment utilisées dans des domaines comme la biologie laissent trop souvent à désirer (il suffit de lire les « Instructions for Authors » d’une revue comme Nature pour s’en convaincre…). Dans des débats aussi brûlants que celui sur les OGM, où les convictions idéologiques l’emportent trop souvent sur les considérations scientifiques, on se doit d’être exemplaire …
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A la une : Minouto, CC BY-SA 2.0 , via Wikimedia Commons
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Par exemple, on pourra écrire que sont les deux solutions complexes de l’équation .
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