Dans son livre Nouveau Climat sur la Terre, Hervé Le Treut souligne que l’imprévisibilité déterministe du temps (weather) au delà d’une dizaine de jours, liée au caractère chaotique des solutions des équations de l’hydrodynamique, n’implique pas l’imprévisibilité statistique du climat à l’échelle de décennies ou plus. Pour rendre la chose plus concrète il écrit :
Prenons le domaine de la vie courante. Nous pouvons anticiper le risque d’embouteillage aux abords du boulevard périphérique après 17 heures, même si nous ne savons pas prévoir dans le détail à quelle heure M. Dupont voudra sortir faire ses courses. Il existe en effet de grands déterminants tels que l’heure de fermeture des bureaux qui régissent de manière collective l’évolution de la circulation automobile.
Dans L’Imposture Climatique Claude Allègre donne un autre exemple concret :
Imaginez que vous êtes dans la Montagne Noire au sud du Massif Central sur certaines crêtes : eh bien, le devenir d’une goutte d’eau dépend de minuscules paramètres. Si elle tombe sur telle ou telle crête, à un centimètre près, la goutte va finir soit dans l’Atlantique, soit dans la Méditerranée.
En fait ici Allègre illustre bien, non pas l’imprévisibilité du temps, mais celle de certains aspects du climat, le problème du passage possible—et parfois peu prévisible—d’un bassin à un autre.
Les systèmes mécaniques dissipatifs, comme le système océan-atmosphère, possèdent typiquement une multiplicité d’attracteurs.
Un exemple particulièrement simple est celui des positions d’équilibres stables d’un corps rigide. En général il y en a plusieurs. Chacune a son bassin, c’est à dire l’ensemble des conditions initiales dans l’espace des phases (positions, vitesses, angles d’Euler, etc) dont la trajectoire amènera le corps à telle ou telle position d’équilibre. Ces divers bassins, par définition distincts, sont typiquement intriqués.
Un cas bien compris a déjà été décrit dans Images des Maths ; il s’agit de la résolution d’une équation du troisième degré par l’algorithme de Newton–Raphson, en partant d’une valeur initiale. Chacune des trois solutions de l’équation a son bassin, mais la séparatrice entre les bassins est une fractale au sens de Mandelbrot.
On constate, en grossissant, que des petites régions d’une couleur sont entourées de tous côtés par des régions d’autres couleurs, en sorte qu’une faible modification de la condition initiale dans à peu près n’importe quelle direction peut changer le bassin. A noter que cette nouvelle forme d’imprévisibilité n’empêche pas d’obtenir dans la pratique le résultat par voie de simulation numérique, mais si on est trop proche d’une séparatrice (ce qui est peu probable) il faut calculer à haute précision.
Les systèmes dynamiques naturels sont soumis à de faibles perturbations extérieures (vent solaire, rayons cosmiques, etc) que l’on peut considérer comme des perturbations aléatoires. De ce fait le système a la possibilité de changer de bassin d’attraction et donc de « changer de climat ». Des modèles à deux attracteurs sont fréquemment considérés en modélisation climatique.
Evaluer la probabilité de tels changements d’attracteurs est un problème difficile.
Un basculement d’un attracteur/climat vers un autre ne doit pas être confondu avec un changement lent « adiabatique » des propriétés statistiques d’un attracteur sous l’action, par exemple, d’un forçage anthropique. De tels changements sont couramment modélisés par voie de simulation sans qu’on se heurte à un obstacle majeur d’imprévisibilité.
Il est possible d’utiliser des commandes LaTeX pour rédiger des commentaires — mais nous ne recommandons pas d’en abuser ! Les formules mathématiques doivent être composées avec les balises .
Par exemple, on pourra écrire que sont les deux solutions complexes de l’équation .
Si vous souhaitez ajouter une figure ou déposer un fichier ou pour toute autre question, merci de vous adresser au secrétariat.